Africa Great Lakes Democracy Watch



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Friday, September 10, 2010

L’étoile de Paul Kagamé pâlit

Le vainqueur des génocidaires hutus, champion du développement, préoccupe par ses dérives. Mais l’ONU le considère comme un pilier de la politique de sécurité en Afrique
Pourfendeur du régime génocidaire hutu, Paul Kagamé jouissait, il y a peu encore, d’une réputation enviable sur la scène internationale. Les soutiens anglo-saxons du président du Rwanda en ont fait l’archétype d’une nouvelle génération de leaders africains, dédié sans réserve à la reconstruction et au développement économique de son pays.
A raison, explique Peter Pham, vice-président du National Committee on American Foreign Policy, un institut de réflexion new-yorkais: «Personne ne nie que le Front patriotique rwandais de Kagamé a accompli des progrès remarquables.» «L’économie croît, les rues sont propres et sûres, la corruption est sous contrôle et les femmes occupent une place importante», note Charles Landow, directeur associé au Council on Foreign Relations, un autre centre de recherche américain, dans une tribune du New York Times intitulée «Le dilemme Kagamé». S’il bénéficie de ce que Peter Pham appelle une «culpabilité résiduelle» de la communauté internationale, inapte à prévenir l’horreur en 1994, «Kagamé plaît aussi, car il manie un discours politiquement correct. Nouvelles technologies, ouverture du pays, privatisations, environnement, tous les clichés du développement sont là», tempère un autre spécialiste.
Au cours des dix-huit derniers mois pourtant, le prestige de «l’hyper-président» rwandais s’est altéré. D’abord, fin 2008, un rapport onusien a dénoncé l’appui de Kigali à la milice tutsie de Laurent Nkunda, bourreau des populations civiles dans le Kivu, en République démocratique du Congo (RDC) voisine. Ensuite, cet été, les incidents de la campagne pour la présidentielle rwandaise (tentative d’attentat contre un dissident en Afrique du Sud, assassinat d’un journaliste et d’un opposant) ont alarmé les ONG et troublé les observateurs. Fin mai, le Département d’Etat américain s’est ainsi ému d’«actions inquiétantes» menaçant la liberté d’expression. «Une gouvernance démocratique et le respect des droits de l’homme sont de meilleurs gages de stabilité à long terme», a insisté Johnnie Carson, le responsable des affaires africaines à Washington.
De son côté, la Grande-Bretagne, premier pourvoyeur d’aide étrangère au Rwanda, a laissé entendre qu’elle pourrait revoir à la baisse son appui financier. Et en juillet, Paul Kagamé, tout juste nommé par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, à la présidence d’une commission de personnalités engagées pour les Objectifs du Millénaire, a été humilié à Madrid. Acculé par la pression politique et celle des ONG, le chef du gouvernement, José Luis Zapatero, coprésident de la commission, a renoncé in extremis à le rencontrer. En Espagne, une procédure ouverte en 2008 vise 40 militaires de l’entourage du président Kagamé, accusés de «génocide».
Sa réélection le 9 août dernier, au score exorbitant de 93% des voix, n’a guère offert de répit à l’homme fort de Kigali. Certes, les observateurs dépêchés par le Commonwealth – qui a accueilli le Rwanda en 2009 – ont évoqué un «scrutin globalement bien organisé et pacifique». Bruxelles et Washington ont chacun adressé des félicitations, mesurées, à Paul Kagamé. Mais Joseph Sanane, le président de la Ligue des droits de la personne dans la région des Grands Lacs (LDGL), dresse un constat autrement circonspect: «Des pressions ont été exercées sur les électeurs, le caractère secret du vote a été entravé, et dans certains villages le vote a commencé bien avant l’ouverture des bureaux.» Selon la LDGL, au Rwanda, les droits de l’homme sont «sous contrainte». «La justice est sous le joug de l’exécutif, l’espace public est fermé, la presse bâillonnée et les gens s’informent par la rumeur. Ils ont peur», relate Joseph Sanane.
Fin août, les fuites dans la presse mondiale d’un rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (LT du 4.9.10) achèvent de brouiller l’image. Entre autres responsabilités accablantes, le document pointe celle de l’Armée patriotique rwandaise de Kagamé dans le massacre «systématique» entre 1996 et 1997 de milliers de Hutus réfugiés sur le sol congolais.
Ces événements, connus des spécialistes, ne l’étaient pas du grand public. Leur révélation au grand jour a excédé le Rwanda, qui menace de retirer ses quelque 3600 soldats des forces de maintien de la paix au Darfour et au Sud-Soudan. Ban Ki-moon prend ce chantage très au sérieux. Mercredi, il a effectué une visite impromptue à Kigali, pour tenter, commente un observateur, d’y «arrondir les angles» avec un Paul Kagamé furieux. «Ban devait y aller, estime Peter Pham. Cette crise n’aurait jamais dû se produire et elle peut avoir des conséquences tragiques pour la sécurité en Afrique. Le Rwanda est tout à fait capable de retirer ses troupes. Or aucune autre armée n’est en mesure de remplacer ses contingents.» Jeudi, Ban Ki-moon a indiqué être «tombé d’accord» avec Paul Kagamé sur «l’importance» de leur maintien.